Les archives de Dioscore d'Aphrodité en images :

La banque des images des papyrus de l'Aphrodité byzantine (BIPAb)

logo

Conçue et dirigée par Jean-Luc Fournet

~

Conception et suivi de la réalisation du site par Stavros Lazaris

~

Avec le soutien de l'UMR 7044 « Étude des Civilisations de l'Antiquité »

et de l'Association Internationale de Papyrologues

 

PRÉSENTATION
par Jean-Luc Fournet
(École Pratique des Hautes Études, UMR 8167, Paris)

Qu'est-ce que la BIPAb ?
La papyrologie est désormais indissociable de l'imagerie numérique qui a instauré, dans ce domaine, un nouveau mode de travail dans lequel l'étude d'un document n'est désormais plus totalement astreinte à la contraignante autopsie sans pour autant se priver des bénéfices irremplaçables de cette dernière. Depuis les années 1990 se sont multipliées les bases d'images donnant accès, via internet, à une collection ou à un ensemble de collections. Par rapport à ces bases de type « vertical », la Banque des Images des Papyrus de l'Aphrodité byzantine (BIPAb) est d'un genre nouveau : c'est la première banque d'images « horizontale », se donnant pour objet, non une collection de documents hétéroclites, mais un ensemble cohérent dispersé entre plusieurs collections. Elle tente de regrouper toutes les images des papyrus grecs et coptes du village d'Aphrodité connus sous le nom d'« archives de Dioscore d'Aphrodité » (VIe siècle après J.-C.), auxquels ont été adjoints, étant donné leurs recoupements prosopographiques avec celles-ci, les papyrus de même provenance trouvés dans les années 1940 [1] — soit un total de quelque 650 papyrus qui en font un des trois plus gros ensembles archivistiques du « millénaire papyrologique » et le plus important d'époque byzantine [2] .
La BIPAb se fonde sur l'inventaire des papyrus que j'ai fait paraître en 2008 dans la Liste des papyrus édités de l'Aphrodité byzantine [3] .

Pourquoi la BIPAb ?
En dehors de l'interêt de ces archives, la nécessité de la BIPAb s'est imposée pour trois raisons :
(1) Les papyrus sont dispersés à leur découverte qui s'est faite pour leur très grande part clandestinement. La plupart d'entre eux ont été exhumés en 1905 par les habitants du village de Kûm Ishqâw (ancienne Aphrodité) avant que n'aient lieu les fouilles de l'inspecteur du Service des Antiquités, Gustave Lefebvre, et ont été vendus à des marchands d'antiquités qui, à leur tour, les ont revendus à diverses collections principalement européennes[4] . Si les papyrus découverts dans les fouilles officielles et ceux que Lefebvre a réussi à racheter aux habitants sont actuellement au Musée du Caire (près de 400 textes édités), les autres ont été dispersés dans quelque 25 collections de plus de 10 pays. La plupart de ces collections n'ont pas encore mis leur fonds en ligne.
(2) Ces papyrus ont été publiés très majoritairement sans photographies, dans des éditions sorties à l'âge héroïque où la couverture photographique intégrale n'était pas encore de règle. Pour s'en tenir aux fonds les plus substantiels, les 358 papyrus du Caire des P.Cair.Masp. ont été édités avec la photographie de seulement 47 d'entre eux; quant aux ca. 70 papyrus de Londres (P.Lond. V), les planches qui devaient être livrées dans un volume séparé ne sont jamais sorties.
(3) Enfin, le nombre des papyrus relevant de ces archives atteint aujourd'hui un seuil critique (environ 650) qui rend le dossier difficilement maîtrisable sans une tentative de regroupement sur un support informatique. La BIPAb, qui n'est qu'un instrument dans un dispositif plus vaste (voir ci-dessous), permet ainsi de réunir pour la première fois virtuellement la totalité de ces archives éclatées.
Son aide devrait intervenir à trois niveaux :
(1) Le travail de révision : les principales publications de ces archives sont maintenant anciennes et de nombreuses pièces appartenant ou non au dossier, connues depuis lors, obligent à reconsidérer les lectures de ces premières éditions.
(2) Le travail d'édition : les archives de Dioscore sont encore loin d'être complètement éditées. Les inédits, le plus souvent fragmentaires, peuvent se raccorder aux papyrus déjà édités. L'absence de photographies dans les publications « historiques » conjuguée à la masse de plus en plus difficilement maîtrisable et à l'état de dispersion de ces archives empêche bien souvent de pouvoir opérer ces raccords. Les récentes éditions de papyrus de cet ensemble, en opérant des raccords, ont montré la nécessité de disposer des images (P.Aphrod.Lit. I, II, III 1, P.Mich.Aphrod., SB XXVI 16529, etc.).
(3) Le travail de compréhension : la BIPAb rend désormais possible un certain nombre d'études ponctuelles sur les archives de Dioscore ou permet la compréhension de certains faits insaisissables sans image. Par exemple, de nombreuses mains du dossier restent à identifier, de même que celles de documents déjà publiés n'ont pas été toujours identifiées avec des mains connues, autant d'informations qui permettraient de délimiter, dans ces archives, des sous-groupes significatifs et apporteraient pour certains textes des données chronologiques ou « contextuelles ». L'identification de certaines mains peut aussi amener à reconsidérer la finalité de certains documents, qui ne sont que des copies.

Comment se servir de la BIPAb ?
Les papyrus sont répertoriés par ordre alphabétique de leur sigle dans la Checklist of Greek, Latin, Demotic and Coptic Papyri, Ostraca and Tablets ) dans la première section (« Éditions pourvues d'un sigle dans la Checklist »). Les textes isolés qui ont été édités trop récemment pour être entrés dans le Sammelbuch des papyrus grecs ou coptes (SB et SB Kopt.) ont été enregistrés sous leur sigle d'inventaire dans une seconde section (« Textes en attente d'un numéro de SB (Kopt.) »). Au fur et à mesure de leur entrée dans la SB (Kopt.), ils seront remontés dans la première section.
Beaucoup de papyrus ont été réédités ; d'autres ont fait l'objet de raccord. Un même texte ou fragment de texte peut donc être connu sous plusieurs sigles et il n'est pas toujours facile de se repérer dans ce maquis de sigles. J'ai donc veillé à donner, quand c'était nécessaire, des correspondances entre ancien et nouveau sigle. C'est normalement le nouveau sigle qui comporte le lien renvoyant à la page où se trouvent les images (« P.Cair.Masp. II 67173 = P.Aphrod.Lit. I, f° 2 ») ; mais dans les cas où un texte se trouve au verso d'un autre texte, je n'ai pas souhaité dissocier des unités bibliologiques (« P.Aphrod.Lit. IV 12 cf. P.Cair.Masp. II 67131 v° ») [5] . Le système de liens permet de toute façon de pallier cette légère incohérence.
Chaque page auquel renvoie un lien est consacrée à un seul papyrus (en tant qu'unité bibliologique ou éditoriale). Elle donne la couverture photographique disponible la plus complète possible (les versos anépigraphes sont évidemment omis), en deux tailles : moyenne (qui permet d'avoir une vue d'ensemble du papyrus) et grande (adaptée au déchiffrement). On trouvera parfois plusieurs images de la même partie lorsque celles-ci ont des propriétés diverses qui se complètent : ainsi une image infra-rouge (« IR ») qui accentue les contrastes ; une image noir et blanc quand elle offre plus de précision que l'image couleurs ; ou une image du papyrus dont les fragments ont été repositionnés par traitement d'images (« remonté ») quand l'original a été mal remonté sous verre [6] .
Les pages ont été conçues de la façon la plus sobre qui soit. On n'y trouvera pas de bibliographie ou d'élements critiques. Le lecteur est prié de se référer à la Liste des papyrus édités de l'Aphrodité byzantine, qui offre un ensemble de métadonnées plus consistant pour chaque entrée, avant de pouvoir consulter la Base des textes (en cours d'élaboration) qui donnera toutes les informations disponibles sur chaque papyrus. La BIPAb se contente de fournir quelques informations de base, permettant notamment à l'utilisateur d'être renvoyé à l'image d'un papyrus se raccordant à celui qu'il consulte ou situé sur l'autre face.

Les limites de la BIPAb.
L'exhaustivité n'a pas été possible : certains papyrus n'ont pas été retrouvés [7] . Il n'a pas été possible de prendre contact avec une collection [8] . Sauf exception, les papyrus dont l'appartenance aux archives de Dioscore (au sens large) est douteuse n'ont pas été inclus [9] . Enfin, les limites du budget alloué à cette entreprise n'ont pas permis d'intégrer certains textes littéraires : cette absence (qui sera, je l'espère, comblée à l'avenir) ne m'a pas semblé si grave pour autant que les textes littéraires ont déjà fait l'objet de couverture photographique publiée [10] .
L'utilisateur remarquera bien vite que la qualité des images est très variable. Le standard idéal est l'image numérique couleurs de haute résolution (600 dpi). Mais cela n'a pas été toujours possible : certaines collections nous ont fait parvenir des scans à plus basse résolution, ou des photos noir et blanc de qualité variable. Certaines photos noir et blanc peuvent néanmoins offrir des avantages que les scans n'ont pas : ainsi les photos des P.Cair.Masp. réalisées par Adam Bülow-Jacobsen et Wilfried Van Regen pour le compte des Archives photographiques internationales de Papyrologie, grâce à leur science de la photographie (notamment en matière d'éclairage), présentent souvent un contraste de l'écriture que le scannage ne permet pas toujours. Quand le support était particulièrement foncé, ils ont même utilisé l'infra-rouge, qui surpasse un bon scan.
En bref, la multiplicité des collections et de leurs moyens explique le caractère hybride de cette base. On comprendra donc qu'il n'a pas été possible d'appliquer les mêmes standards à tous les papyrus. La démarche a été avant tout pragmatique : mieux vaut une photo médiocre que rien!
Enfin, l'utilisateur ne doit pas attendre de la BIPAb qu'elle soit une base des archives de Dioscore. Celle-ci viendra plus tard : elle comprendra une fiche descriptive de chaque papyrus avec texte et bibliographie, reliée non seulement à la BIPAb, mais aussi à une base prosopographique que prépare Giovanni Ruffini (Fairfield University) et une base des toponymes à laquelle travaille Isabelle Marthot (Paris). L'ensemble constituera le Guide électronique des archives de Dioscore attendu depuis longtemps.

Remerciements.
La BIPAb n'aurait pu voir le jour sans de nombreux concours. Elle a bénéficié d'une généreuse subvention de l'Association Internationale de Papyrologues en 2000 et de l'aide constante, financière et logistique, de l'UMR 7044 « Études des civilisations de l'Antiquité » (Strasbourg). Que le secrétaire général de la première, Alain Martin, et le directeur (alors en poste) de la seconde, Jean Gascou, ainsi que son successeur, Dominique Beyer, en soient chaleureusement remerciés.
Je dois aussi beaucoup à Stavros Lazaris (UMR 7044) qui a numérisé avec moi les négatifs des P.Cair.Masp. et a surtout assumé, avec disponibilité, la lourde tâche de la réalisation technique de ce projet, aidé de Thérèse et Gregor Puppinck. Je leur en sais gré.
Dans le lent et laborieux travail de rassemblement des images, j'ai reçu de nombreux concours pour lesquels je voudrais témoigner ma reconnaissance : l'Institut Français d'Archéologie Orientale du Caire (alors dirigé par Bernard Mathieu) qui m'a offert les services d'un photographe (Alain Lecler et Mohammed Ibrahim) pour photographier les papyrus du Musée Égyptien du Caire manquant dans les Archives photographiques internationales ; le Centre d'Études Alexandrines, dirigé par Jean-Yves Empereur, qui m'a permis de numériser les papyrus du Musée Gréco-romain d'Alexandrie en 1999 ; Adam Bülow-Jacobsen et Wilfried Van Regen qui m'ont prêté leurs centaines de négatifs afin qu'ils soient numérisés à Strasbourg.
Que les responsables de collections ou les collègues y travaillant qui m'ont fourni les images et les droits de reproduction (parfois gracieusement) ou ont donné accès à leurs fonds soient vivement remerciés : Ahmed Abd El-Fattah (Alexandrie), Isabella Andorlini (olim Istituto Papirologico "G. Vitelli", Florence), Rodney Ast (APIS), G. Bastianini (Istituto Papirologico "G. Vitelli", Florence), Alain Blanchard (Paris), Daniel Bornemann (Strasbourg), William Brashear (Berlin), Francesc Casanovas, s.j. (Barcelone), Mariam Dandamayeva (Saint-Pétersbourg), Robert Daniel (Cologne), Martine De Reu (Gent), Gawdet Gabra (Musée Copte, Le Caire), † Traianos Gagos (Ann Arbor et APIS), Jean Gascou (Paris), D.J. Hall (Cambridge),  Sayyed Hassan (Musée Égyptien, Le Caire), Francisca A.J. Hoogendijk (Leyde), Sigrid Kohlmann (Erlangen-Nüremberg) N. Kruit (Leyde), Alain Jacquesson (Genève), Scot McKendrick (Londres), Fatma Mahmoud (Musée Copte, Le Caire), Rosario Pintaudi (Biblioteca Medicea Laurenziana, Florence), Günther Poethke (Berlin), Ben Primer (Princeton), Fabian Reiter (Berlin), Jordi Roca s.j. (Barcelone), Mervat Seif El-Din (Alexandrie), Don C. Skemer (Princeton),
Je remercie aussi les collègues qui m'ont apporté d'une façon ou d'une autre leur aide à ce projet : Roger Bagnall, Ruey-Lin Chang, Sarah J. Clackson, Jean Gascou, Dieter Hagedorn, Todd Hickey, Ludwig Koenen, Florence Lemaire, Manfredo Manfredi, Alain Martin, Alberto Nodar, Rosario Pintaudi, Cornelia Römer, Paul Schubert, Dorothy Thompson, Sofía Torellas-Tovar.
Enfin, je suis par avance reconnaissant à ceux qui concourront à l'amélioration de la BIPAb par leurs critiques ou en m'aidant à combler les lacunes de cette base. Je saurai gré aux futurs éditeurs de papyrus d'Aphrodité de m'envoyer les images pour permettre ainsi l'actualisation constante de cet instrument de travail que j'espère utile pour tous.

Les images de cette base sont sujettes à des copyrights. Pour toute utilisation dépassant les limites de la consultation de cette base, prière de s'adresser aux ayant-droit.
Je me tiens à la disposition des ayant-droit pour les quelques images pour lesquelles ils n'ont pu être identifiés ou dont le crédit photographique aurait été oublié.





[1] Principalement les P.Michael., P.Mich. XIII et P.Vat.Aphrod.

[2]  Échappent de peu à cette périodisation les P.Mich. XIII 662, 666, SB Kopt. III 1369 et peut-être P.Vat.Copt. 1-3 et 5 (d'après les datations récemment proposées par R. S. Bagnall et K. A. Worp, ZPE 148, 2004, p. 247-252), qui appartiennent à l'ensemble trouvé dans les années 1940. Je n'ai inclus dans cette base que les deux premiers. Le choix de s'en tenir aux archives de Dioscore, même prises dans un sens large, excluait d'office les papyrus d'époque omeyyade (P.Lond. IV, etc.), ainsi qu'un certain nombre de textes comme les P.Fouad 86-89 (lettres monastiques du « monastère d'Aphroditô », vie s.), P.Giss. 55 (lettre d'un évêque, Thébaïde, vie s., qui n'appartient pas aux archives de Dioscore car achetée en 1902 et datable plutôt de la fin iv/ve s. d'après la photo), SB XX 14544-14573 (archives des huiliers d'Aphrodité sur ostraca, vie s.). Sur les délimitations des archives de Dioscore, voir en dernier lieu J.-L. Fournet, « Archive ou archives de Dioscore? Les dernières années des "archives de Dioscore" », dans J.-L. Fournet (éd.), Les archives de Dioscore d'Aphrodité cent ans après leur découverte. Histoire et culture dans l'Égypte byzantine, Études d'archéologie et d'histoire ancienne, Paris 2008, p. 17-30 . On trouvera dans cet ouvrage la bibliographie relative à cet ensemble de textes.

[3] Dans J.-L. Fournet (éd.), Les archives de Dioscore d'Aphrodité cent ans après leur découverte, p. 307-343.

[4] L'histoire officielle doit être révisée : le rôle de Lefebvre dans la découverte des papyrus a été très surestimé. Voir J.-L. Fournet, Annuaire EPHE, SHP 140e année (2007-2008), p. 117 en attendant l'étude plus développée que je compte consacrer à ce problème.

[5] « Cf. » est employé à la place de « = » quand il n'y a pas de correspondance exacte. Ainsi, dans l'exemple cité à l'instant, P.Aphrod.Lit. IV 12 ne correspond qu'à une partie du verso de P.Cair.Masp. II 67131.

[6] Florence Lemaire, qui vient de rééditer pour son doctorat (2010), les contrats de location et les reçus de loyer d'Aphrodité a fait bénéficier à la BIPAb des raccords et remontages qu'elle a pu faire. Je l'en remercie.

[7] P.Cair.Masp. I 67018, II 67223 et 67272, SB XX 14240, 14241. Il n'a pas non plus été possible de localiser le papyrus de W.M. Fitzhugh (P.Coll.Youtie II 92) : j'ai contacté un homonyme qui ne m'a jamais répondu…

[8] Malgré plusieurs tentatives, je n'ai pu obtenir des scans des P.Ross.Georg. de Tbilissi. J'ai réussi néanmoins à combler partiellemnt cette lacune par des photos noir et blanc (de qualité néanmoins médiocre) aimablement données par Manfredo Manfredi, qui les tenait du prof. Zaza Aleksidzé (Institut des manuscrits de Tbilissi). Il manque cependant le P.Ross.Georg. V 9.

[9] Ce sont les papyrus préfixés par un « ? » dans la Liste des papyrus édités de l'Aphrodité byzantine.

[10] Pour le codex de Ménandre et celui de comédies anciennes , cf. G. Lefebvre, Papyrus de Ménandre, Le Caire 1911 et L. Koenen et al., The Codex of Menander, Londres 1978. Pour le codex de l'Iliade, celui des Scholia ad Iliadem, les papyrus de conjugaisons et les poèmes de Dioscore, cf. P.Aphrod.Lit. J'ai inclus dans la BIPAb, autant qu'il m'était possible de le faire, les textes littéraires.


>Accueil