Colloque ” Liberté d’expression et sport “, Strasbourg, 4-5 avril 2024

Appel à communication

La tenue en France des Jeux olympiques et paralympiques à Paris en 2024 est l’occasion de penser l’actualité des liens qu’entretiennent la liberté d’expression et le sport. Le caractère plus ou moins légitime des formes d’expression religieuses et politiques des sportifs, des sportives et de leurs supporters, ainsi que des sanctions dont ils et elles peuvent faire l’objet, alimentent régulièrement le débat public. Qu’il soit question des opinions politiques exprimées publiquement par des sportifs (soutien explicite à l’Ukraine, port de brassard en soutien à la cause LGBT+, dénonciations d’agressions sexuelles, etc.) ou des sanctions éventuelles prises par leurs fédérations; qu’il soit question des insultes racistes, sexistes ou homophobes exprimées depuis les tribunes (sous forme de banderoles ou de chants) ou sur les terrains; des formes de harcèlement en ligne des sportifs et sportives ou encore des mesures d’interdiction de stade prises pour des raisons sécuritaires, toutes ces formes d’expression font débat. Dans ce contexte, les instances de régulation des organisations sportives produisent de nouvelles normes pour tenter de clarifier la frontière entre comportements légitimes et problématiques, au prix parfois de contentieux juridiques. Dans le cadre français de l’affaire dite des hijabeuses, en juin 2023, le Conseil d’État a ainsi jugé “adaptée et proportionnée” la réforme des statuts de la Fédération française de football dans laquelle apparaît l’interdiction du “port de signe ou tenue manifestant ostensiblement une appartenance politique, philosophique, religieuse ou syndicale”. De son côté, le Comité International Olympique a revu sa charte pour à la fois garantir que “tous les concurrents, officiels d’équipe ou autres membres du personnel d’équipe participant aux Jeux Olympiques” jouissent de la liberté d’expression, tout en limitant cette liberté au respect des valeurs olympiques, des principes fondamentaux de l’Olympisme et des “directives établies par la commission exécutive du Comité International Olympique”. Ces différents exemples illustrent la manière dont la liberté d’expression est l’objet de définitions, d’orientations et de réglementations spécifiques au domaine des sports tout en suscitant des contestations et des négociations sur sa bonne interprétation et ses applications.

Le colloque “Liberté d’expression et sport” se propose de dresser un état des lieux des luttes encadrant la liberté d’expression en répondant à plusieurs questions. De quelle liberté d’expression jouissent les athlètes et le public dans les arènes sportives ? Par quels dispositifs cette liberté est-elle encadrée, voire limitée ? De quelles (tentatives de) transgressions et redéfinitions ces encadrements font-ils l’objet ? Dans quelles conditions évoluent-ils ? Y a-t- il, dans l’ensemble de ces processus, des enjeux spécifiques au sport, ou les luttes autour de la liberté d’expression sont-elles comparables à celles qui se déploient dans d’autres espaces ?

Les propositions de communication pourront s’inscrire dans des disciplines variées et prendre pour objet des cas d’étude empiriques divers, sans se borner à la France ni à l’actualité récente. Plusieurs axes, dont la liste n’est pas exhaustive, pourront être abordés dans les communications :

  • Encadrement de la liberté d’expression des sportifs et sanctions. Certains sportifs font l’objet de sanctions lorsqu’ils expriment une opinion politique ou encore qu’ils ou elles dénoncent une situation qu’ils considèrent comme problématique. Quels propos et quels comportements sont sanctionnés ? De quelles façons ? Par quelles instances ? Qui a le pouvoir de décider des frontières de la liberté d’expression des sportifs, sportives et de ses limites : les États, les fédérations sportives, les sponsors, le public ?
  • Sport, liberté d’expression et exigence de neutralité. Dans un monde globalisé, le principe de neutralité politique du sport, tel que formulé par la règle 51 de la Charte Olympique et la Loi 4 de la FIFA qui excluent toute forme d’expression politique ou religieuse sur les terrains de sport, est mis sous tension. Dans ce contexte, de quelles adaptations fait-il l’objet ? Comment se structurent les luttes entre les acteurs qui conçoivent les manifestations sportives comme des tribunes politiques et ceux qui prônent l’apolitisme ? Quels sont les modalités et les enjeux de ces conflits ? La question se pose également dans le cas de la France dont la ministre des sports a rappelé l’interdiction du port de signes religieux pour les athlètes françaises dans le cadre des Jeux Olympiques en 2024 à Paris. Comment analyser les différentes applications de l’exigence de neutralité dans un même espace ?
  • Liberté d’expression et discours de haine. Des infractions relatives à la liberté d’expression sont couramment dénoncées dans le cadre de manifestations sportives. Les injures, les expressions de racisme, les discriminations y sont fréquents, que ce soit dans les tribunes (affaire de la banderole “anti-ch’ti”, cris de singe, débat autour du caractère systématiquement homophobe du mot “enculé”, etc….) ou sur le terrain (geste de la “quenelle”, insultes entre joueurs ou envers l’arbitre, etc.). Y a-t-il une spécificité des discours de haine dans le cadre sportif ? De quelles formes de régulation les espaces sportifs, les athlètes et leur public font-ils l’objet ? Comment ces règles sont-elles mises en œuvre, sont-elles contestées ? Quels sont leurs effets ? Y a-t-il des différences dans ces manifestations de haine selon les pays et selon les législations qui encadrent la liberté d’expression ?
  • Liberté d’expression, journalisme et commentaire sportif. Le sport est également très présent en dehors des espaces des compétitions. Les manifestations sportives font l’objet de différents types de discours (commentaires experts, caricatures de presse, insultes, etc.), émanant d’une multitude d’acteurs professionnels (comme les journalistes sportifs) et amateurs, et tenus dans des espaces variés (allant de la presse aux réseaux sociaux en passant par les bars). Quels types de discours sont considérés acceptables, et dans quelles arènes ? Par quelles normes juridiques et sociales sont-ils encadrés ?

Calendrier :

  • 19 janvier 2024 : Soumission des propositions par mail à l’adresse hkarimi@unistra.fr.
  • 26 janvier 2024 : Envoi des notifications d’acceptation.
  • 4-5 avril 2024 : Colloque à la BNU de Strasbourg.

Comité d’organisation :

Le colloque est organisé par l’équipe française de la chaire de recherche France-Québec sur les enjeux contemporains de la liberté d’expression (Colibex) :

  • Anna Arzoumanov (MCF en linguistique et en littérature françaises à Sorbonne Université – STIH )
  • Thibaud Boncourt (Professeur de science politique à l’Université Jean Moulin Lyon 3, Triangle, Membre junior de l’Institut Universitaire de France)
  • Thomas Hochmann (PU droit public, Université de Nanterre, Centre de Théorie et Analyse du Droit– Membre de l’Institut Universitaire de France)
  • Hanane Karimi (MCF de sociologie à l’université de Strasbourg – LinCS)
Université de Strasbourg
Université de Haute-Alsace
CNRS
Réseau national des Maisons des Sciences de l'Homme