En feuilletant les premières pages modernes : objets mobiles et innovations techniques

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Séminaire

Séminaire Fellows - USIAS

20 May 2021
12h30 14h
En ligne

Ce séminaire propose d’explorer la manière dont les lecteurs interagissaient avec les livres imprimés du 16e au 18e siècle, en Angleterre et sur le continent. En effet, cette période a vu naître d’innombrables innovations en matière d’imprimerie - des pop-ups et des feuilles à plis aux gravures de plus en plus élaborées et aux expérimentations avec la typographie et les encres -, qui ont toutes marqué l’apparition de nouveaux modes de lecture. Quelles ont été les conséquences de ces transformations ? Qui lisait ces ouvrages, véritables prouesses techniques - planches d’anatomie animées, volvelles astronomiques, manuels de typographie qui encourageaient les lecteurs à écrire sur leurs pages - et comment ceux-ci étaient-ils commercialisés ? Enfin, comment la littérature du début de l’époque moderne et ses lecteurs interagissaient-ils avec ces « corps de papier » (pour emprunter la formulation évocatrice de la philosophe du 17e siècle Margaret Cavendish), et comment pouvons-nous mettre en lien leur expérience avec nos propres manières de lire et d’acquérir du savoir ? Si les faits et les connaissances du début de la période moderne concernent des objets et des idées qui sont fabriqués, plutôt que comme aujourd’hui des objets et idées qui existent, les lecteurs de l’époque étaient donc profondément impliqués dans les processus d’acquisition du savoir par la manipulation de livres interactifs, processus aujourd’hui perdus suite au développement de la lecture individuelle et silencieuse. 

Ce séminaire se concentre sur un phénomène particulier de l’histoire des sciences : l’invention de planches d’anatomie animées au 16e siècle. Face à ces livres pop-up du début de l’époque moderne, le lecteur était encouragé à soulever le rabat représentant le torse d’un homme ou d'une femme assis afin de révéler les organes et viscères qu’il abrite. Le lecteur répliquait ainsi l’expérience de l’anatomiste professionnel, ouvrant le corps pour en révéler les secrets. La plupart des textes étaient simples, et consistaient en un dessin et un rabat uniques. Toutefois, l’ouvrage Catoptrum microcosmicum de Johann Remmelin (1618 et passim), qui incluait de multiples rabats et parties mobiles complexes, représente une exception fascinante. Son aspect le plus remarquable est qu’au fil de ses réimpressions en Angleterre, nombre de ses illustrations ont été mises à jour. Ainsi, à la fin du siècle, la plupart des nouvelles éditions ne comportaient pas des copies obsolètes d’images issues des siècles précédents (comme c’était le cas dans le texte original), mais des illustrations à la pointe de la médecine contemporaine.


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