Fritz Beblo : un architecte à Strasbourg (1903-1918) - Réinventer la tradition
Fritz Beblo a marqué comme peu d’architectes la ville de Strasbourg, aussi bien par les nombreuses constructions édifiées durant sa longue période (1903-1918) à la tête du service d’architecture municipal, dont la plus emblématique reste les Bains municipaux, que parce qu’il a laissé derrière lui, même après son expulsion en 1918, des pratiques et des conceptions qui perdureront jusque dans les années 1960, à travers la réalisation de projets qu’il a esquissés, mais qui furent exécutés plus tard, comme la Grande percée ou la place de la Bourse.
Pourtant, c’est toujours un personnage peu connu du grand public strasbourgeois. Grâce à la générosité exceptionnelle de ses descendants, qui ont mis à la disposition de la BNU un large ensemble de dessins, d’albums de photos et de peintures, l’exposition veut faire découvrir son œuvre avec un regard nouveau. Animé d’un amour idéaliste pour une ville dont il voulait préserver le caractère multiséculaire tout en l’adaptant aux nécessités du monde moderne, Fritz Beblo, né en Silésie, a « réinventé » une tradition alsacienne en se servant d’un langage qui tire sa richesse d’un dialogue intime avec le passé. Et c’est sa propre maison de la Robertsau qui fut l’idéal d’une création respectueuse des traditions, sans refuser le recours aux techniques d’avant-garde. La vie entre simplicité et proximité avec la nature qu’il y mena avec sa famille s’inscrivait dans la mouvance de la « Lebensreform » (réforme de la vie) allemande, anticipant ce que devait être selon lui le futur radieux de Strasbourg, confiante dans l’avenir car enracinée dans son passé.
Entre 1940 et 1944, son fils Richard, lui aussi architecte, tentera de poursuivre son œuvre dans un contexte évidemment moins favorable, mais là encore, certaine de ses recommandations survivront à l’éphémère « Gau Baden-Elsass » et marqueront la reconstruction des années cinquante. Aujourd’hui, de nombreux Strasbourgeois (et des écoliers plus nombreux encore) utilisent toujours les bâtiments laissés par Fritz Beblo, dont l’héritage prend pleinement place au sein de la reconnaissance du patrimoine de la Neustadt auprès de l’UNESCO.
Commissariat
- Alexandre Kostka, professeur d’histoire culturelle des pays germaniques, Université de Strasbourg
- Christophe Didier, conservateur général des bibliothèques, Bibliothèque nationale et universitaire
- Assistés de Tobias Möllmer, chercheur post-doc dans le projet « Engineering nationality »