Journées interdisciplinaires : États, religions et sociétés "Le défi géopolitique"

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Colloque
28 February 1 March 2023
Salle Pasteur - Palais universitaire

La géopolitique est selon Yves Lacoste, « presque la seule discipline à prendre en compte les dimensions et multiples caractéristiques géographiques de chacun des territoires qui sont enjeux de conflits ». Si l’éminent professeur émérite de l’Université Paris-VIII insistait ainsi sur l’idée de territoire, il nous semble toutefois important d’observer ses multiples et immatérielles épaisseurs, comme nous y invite, par exemple, la notion de « cyber-espace ». Quant au jeu complexe des stratégies, de la plus soft à la plus guerrière, pour dominer ou maîtriser ces « espaces », il semble traverser les âges, sans prendre une ride.
Parmi les modalités de domination et d’influence, les leviers religieux sont toujours en bonne place. Dispositifs de sens, cadres éthiques et normatifs déterminant l'action des individus et des communautés, les religions sont aussi investies par les sociétés humaines comme des « récits » qui fondent un enracinement historique, délimitent une sphère d’influence ou justifient l’expansion. A ce titre, elles sont courtisées et manipulées par les détenteurs du pouvoir, avec ou sans la complicité des religieux.
L’inquiétude reste légitime car les dynamiques religieuses contribuent autant à régénérer la vie individuelle et collective, qu’à semer cet idéalisme aveuglant et soluble dans le messianisme politique qui libère les fantasmes de toute puissance et d’exclusion. Matrices multi-séculaires des cultures, les religions oseront-elles forger un autre paradigme pour servir le bien commun et se prémunir des manipulations ? Leur crédibilité même n’est-elle pas ici en jeu ?
Des pistes existent pour répondre à ces questions, comme celle du théologien Claude Geffré qui chercha à articuler singularité et universalité de la vérité dans l’ordre religieux. Le sociologue allemand Hans Joas plaide quant à lui pour une réinvention « prophétique » de l’idée de « Transcendance » à mettre au service de la « désacralisation radicale de toutes les structures de domination politique et d’inégalité sociale ». Enfin François Mabille voit dans le dialogue interreligieux l’émergence d’un « nouveau régime d’interaction » entre religions en vue d’un meilleur positionnement au cœur des évolutions globales et des jeux d’influence.
Dans le Monde Diplomatique (1999), Ignacio Ramonet écrivait un jour : « la puissance modernisatrice de la mondialisation et le projet de celle-ci d’homogénéiser culturellement la plupart des sociétés du monde provoquent, un peu partout, des replis identitaires autour, en particulier, des doctrines religieuses ». On le vérifie presque partout, devinant le danger mortel que courent les religions. Parviendront-elles à rester assez libres pour échapper à la séduction des agendas politiques, en inaugurant un nouveau régime de coexistence et en participant à leur façon, à l’émergence de modes d’interactions humaines propices à la gestion durable de notre monde ?

Billeterie

 


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